22 décembre 2019

Les Misérables


Les Misérables
de Ladj Ly a reçu le Prix du Jury au Festival de Cannes 2019.

Le film débute par des scènes de liesse populaire et de cohésion en juillet 1998, après la victoire de
l'équipe de France de football. Stéphane (Damien Bonnard) est muté à Montfermeil dans le 93. On va suivre sa journée d’intégration dans la brigade de police de Chris (Alexis Manenti) et Gwada (Djebril Didier Zonga), alors qu'un drame couve dans la cité des Bosquets qui est prête à s'enflammer au cœur de l'été...

Tous les acteurs sont incarnés avec de la profondeur :
- Damien Bonnard campe un flic intègre,
novice dans cette cité, d'abord en posture d'observateur. Je l'avais adoré, dans un autre registre, en amoureux transi d'Adèle Haenel dans En liberté ! de Pierre Salvadori
- Alexis Manenti est hallucinant en flic hargneux, raciste et excessif
- Djebril Didier Zonga est son équipier de longue date
- les enfants surnommés "les microbes", acteurs non professionnels très convaincants, parmi lesquels le personnage d'Issa et le propre fils du réalisateur en pilote de drone, qui jouent des rôles essentiels à l'intrigue
- Jeanne Balibar est présente dans une seule scène mais cela suffit à rendre son personnage crédible.

Le film délivre un constat brut, sans jugement, ni donner de leçon. Les émeutes de 1995 n'ont rien changé en banlieue : ce n'est facile pour personne et la réalité de la situation est complexe, rien n'est blanc ou noir.

Ladj Ly a grandi et habite toujours à Montfermeil. Il
très impliqué dans la vie de sa cité : il y a ouvert une école de cinéma et a fait du "cop watch" qui consiste à surveiller les agissements de la police en les filmant.

La séquence finale est un coup de poing, sous tension permanente, qui tutoie l'oppression, jusqu'à la dernière image qui est glaçante. La citation qui ouvre le générique est extraite du livre éponyme de Victor Hugo qui se déroule à Montfermeil : "Mes amis, retenez ceci, il n'y a ni mauvaises herbes ni mauvais hommes. Il n'y a que de mauvais cultivateurs."

J'ai noté des clins d'oeil au collectif Kourtrajmé : la photo de JR en noir et blanc avec Ladj Ly pointant un appareil photo comme un flingue, un extrait de Clique de Mouloud Achour sur un écran de télévision, et on ne peut pas s'empêcher de penser à La Haine de Mathieu Kassovitz, mon premier choc au cinéma il y a plus de 20 ans déjà.

Des dialogues drôles parfois (comme
Stéphane surnommé "pento" à cause du gel dans ses cheveux), qui sonnent systématiquement justes. La musique originale de Pink noise est très prenante et colle à l'action de ce drame traité comme un thriller.
 
Les Misérables
est l'un des meilleurs films que j'ai vus en 2019 ! Il est à la hauteur de mes grandes attentes depuis Cannes. Il est désormais dans la course aux Oscars 2020 en représentant la France dans la catégorie Meilleur film étranger.


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