16 mars 2015

Birdman


Birdman (ou la surprenante vertu de l'ignorance) est le grand gagnant des derniers Oscars. Il a remporté 4 prix parmi les plus prestigieux : Oscar du Meilleur film, Oscar du Meilleur réalisateur, Oscar du Meilleur scénario original et Oscar de la Meilleure photographie.
Alejandro González Iñárritu en est le réalisateur, après des films remarqués comme Biùtiful, Babel et 21 grammes.

Ce film donne un rôle d'envergure à Mickael Keaton, que l'on avait un peu perdu de vue depuis qu'il avait incarné Batman (en 1989 et 1992 - déjà).

Il joue le rôle de Riggan Thomson, l'ex acteur des films de super héros Birdman, qui veut regagner l'estime des critiques et du public en se produisant sur les planches. Il répète à Broadway la pièce What we talk about when we talk about love. On assiste aux derniers filages la veille de la première, alors que rien ne semble prêt pour ce rendez-vous avec les spectateurs et les journalistes.
L'ironie du film c'est que Michael Keaton, ex Bruce Wayne, incarne l'ex Birdman. La fiction rejoint la réalité, il y a une double lecture à son rôle.

La réalisation est phénoménale : Iñárritu multiplie les plans séquences de plusieurs minutes, impliquant plusieurs acteurs. Il propose également des portraits en très gros plan ou joue avec les réflexions des personnages dans les miroirs. C'est magnifique de maîtrise tout en servant l'intrigue.

D'autre part, le film comporte une part de fantastique, on se situe entre rêve et réalité, folie et imaginaire. Le scénario, quoique linéaire, est bien construit. Et le film ne manque pas d'humour et d'originalité.

Emma Stone joue sa fille et son assistante personnelle. Avec ses yeux démesurément grands, comme exorbités, elle est une junkie qui sort de rehab, tatouée et blonde platine, qui cherche sa place auprès d'un père jadis célèbre.

Edward Norton est flamboyant. Il joue l'autre rôle masculin de la pièce, un acteur de théâtre reconnu et en vogue, avec un égo démesuré. Les scènes d''affrontement entre Michael Keaton et lui sont dantesques !
 
Naomi Watts (déjà dans 21 grammes) incarne l'une des comédiennes de la pièce, un second rôle mais essentiel au film. Elle y est très juste.

Zach Galifianakis est surprenant dans un rôle tout en retenue de producteur de pièce de théâtre.

Les Oscars gagnés sont tellement mérités à mes yeux.
J'en aurai également donné aux acteurs mais la concurrence était rude cette année, aussi bien pour les premiers que seconds rôles.

5 mars 2015

Timbuktu


Timbuktu est le grand gagnant des César 2015 ! Il a remporté 7 César : Meilleur film, Meilleur réalisateur, Meilleur scénario original, Meilleur montage, Meilleure musique, Meilleur son et Meilleure photographie.
Il a également été nommé aux Oscars dans la catégorie Meilleur film étranger - représentant donc la Mauritanie pour la première fois à cette cérémonie - mais c'est Ida, le film polonais, qui a gagné.

Abderrahmane Sissako est le réalisateur de Timbuktu, connu notamment pour le film Bamako sorti en 2006.
Le film raconte la vie dans un village, sous le joug des islamistes, qui font irruption au milieu des campements et des troupeaux de bêtes.

Plusieurs scènes du film comportent des traductions des échanges et font appel à des interprètes : cela met en avant le grand nombre de dialectes et les échanges complexes entre différentes tribus.

Le film comporte des scènes très dures : je retiens notamment des lapidations ou des femmes mariées de force.
Le film insiste sur l'absence de liberté et le ridicule de certaines lois mises en place par les fanatiques islamistes : une femme est obligée de porter des gants pour cacher ses mains qui sont jugées indécentes alors qu'elle vend du poisson sur le marché et a besoin d'avoir ses mains nues pour travailler.

Certaines scènes très fortes et marquantes sont réservées à un public averti : par exemple, une femme est condamnée parce qu'elle a chanté chez elle avec des amis alors que c'est interdit. Elle est fouettée en place publique mais se met à chanter, les larmes coulant le long de ses joues. C'est la scène qui m'a le plus touchée. Visuellement et émotionnellement, c'est très fort et riche de sens sur la privation des droits individuels et comment se sentir toujours libre malgré les fanatismes.

Il y a beaucoup de poésie face aux lois de la police islamique. Je retiendrai également la scène dans laquelle des enfants jouent au football sans ballon, mimant les passes et les buts, c'est fort symboliquement.

Le film prend son temps, il suit un rythme particulier.

C'est un film essentiel dans la mesure où, dans cette époque marquée par le fanatisme de certains extrémistes, il met en lumière les choix de vie pour préserver ses libertés individuelles, même sous la dictature.
Il comporte de très beaux plans, par exemple des plans nocturnes de toute beauté ou encore des silhouettes évoluant sur les dunes. Le César de la meilleure photographie trouve tout son sens.
En revanche, je n'aurai pas donné tous ces César à ce film, notamment le prix du Meilleur montage n'est pas vraiment justifié à mon avis.