2 février 2020

Jojo rabbit


Jojo rabbit est un film du réalisateur néo-zélandais Taika Waititi, avec Roman Griffin Davis et Scarlett Johansson.

En 1943, en Allemagne, Joseph Betlzer (Roman Griffin Davis), un aryen de 10 ans, vit avec sa mère Rosie (Scarlett Johansson) qui l'élève seule. Lors d'un weekend d’initiation aux jeunesses hitlériennes, il hérite du surnom "Jojo rabbit" par des officiers nazis  Il a deux amis : son camarade Yorki et un ami imaginaire qui a les traits d'Adolf Hitler ! Jojo rabbit narre 6 mois décisifs de la vie de Jojo qui vont le faire grandir, en le confrontant aux préjugés, au racisme, à la mort, à l'expérience de l'amitié et de l'amour.

Il ne faut surtout pas avoir peur d'aller voir ce film au pitch déroutant ! Malgré le sujet, j'ai ri toutes les 30 secondes. C'est un film essentiel et le choix du réalisateur d'utiliser le filtre de la comédie permet de mettre en exergue les absurdités de l'époque, comme les croyances que les juifs sont télépathes ou des fantômes.
La scène d'ouverture du film donne le ton avec une dizaine de "Heil Hitler" (le salut fasciste) tourné en dérision. Soit on rit de suite en comprenant le second degré permanent et l'absurdité des dialogues ou des costumes, soit on n'adhère pas et on ne va pas être embarqué par cet ovni cinématographique.
Qu'est-ce que j'ai pu rire de l'horreur des dialogues qui font en même temps froid dans le dos.
75 ans après la libération du camp d’Auschwitz, 57% des Français ignorent le nombre de juifs tués lors de la Shoah. Alors que l'antisémitisme est en forte croissance, ce film résonne encore davantage aujourd'hui.

Taika Waititi signe également le scénario (adapté du livre Le ciel en cage de Christine Leunens) et il est méconnaissable dans le rôle d'Hitler, l'ami imaginaire de Jojo. Remarqué au festival de Sundance, lauréat du prix du scénario adapté de la Writers Guild Award (aux côtés de Parasite pour le scénario original), Jojo rabbit a raflé 6 nominations aux BAFTA et autant aux Oscars (dont meilleur film, meilleure actrice dans un second rôle pour Scarlett Johansson, meilleur scénario adapté et meilleur montage).
Le choix du cadre est remarquable, j'ai été surprise et épatée par le parti pris du metteur en scène. Par exemple, les gros plans sur les chaussures de Jojo ou de sa mère m'ont fait, selon les moments, sourire, rire ou pleurer.

Et quel casting, toute la distribution est magistrale :
- Le rôle principal de Jojo est campé par le jeune franco-britannique Roman Griffin Davis : pour son premier rôle, c'est très prometteur grâce à un talent instinctif.
- Scarlett Johansson brille dans tous les registres ! J'admire cette actrice depuis Lost in translation de Sofia Coppola, en passant par Match point de Woody Allen, Her où sa voix séduisait Joaquin Phoenix, jusqu'à Marriage story de Noah Baumbach disponible sur Netflix, dans lequel elle se déchire avec Adam Driver. Ce film lui vaut une seconde nomination aux Oscars cette année, cette fois en tant que meilleure actrice, une situation quasi inédite : même si le doublé semble hors de portée, l'Oscar pour Jojo rabbit semble plus accessible.
- Thomasin McKenzie (dont 2 nouveaux films vont sortir, avec une filmographie en comptant déjà 6) incarne Elsa avec une grâce infinie.
- Sam Rockwell (Les associés, Confessions d'un homme dangereux, 3 billboards... et bientôt dans Le cas Richard Jewell de Clint Eastwood) est excessif à l'image de son uniforme final flamboyant.
- Dans deux rôles de nazis sadiques, à contre-emploi de leurs comédies habituelles, Rebel Wilson et Stephen Merchant sont jouissifs.

C'est drôle, surprenant, poétique, sensible et dramatique. Un joyeux bordel qui a du sens et fait forcément penser à La vie est belle de Roberto Benigni, mais aussi à la folie douce de Wes Anderson. La citation de Rainer Maria Rilke en clôture du film synthétise la beauté et la portée de ce film atypique : “Let everything happen to you. Beauty and terror. Just keep going. No feeling is final.
Il y a des films qui vous marquent à vie, dont les images restent en vous. Jojo rabbit en fait partie pour moi.
 

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